Nessim Hachaichi sur le sommet de l’Everest : l’imposture d’un homme, l’incompétence des médias

 Nessim Hachaichi sur le sommet de l’Everest : l’imposture d’un homme, l’incompétence des médias

Depuis quelques jours, mes amis et moi tentons d’alerter les médias sur ce qui est devenu un véritable scandale : « le mytho de l’Everest », alias Nessim Hachaichi, un Algérien de 36 ans qui prétend avoir atteint le Toit du monde. C’est faux. Il a menti.

Dans le monde de l’alpinisme, ce genre de supercherie est extrêmement rare, parce que dans ce milieu, tout se sait, et qu’il repose sur des règles strictes. On ne triche pas avec une montagne comme l’Everest. Et pourtant, Nessim Hachaichi a cru que son mensonge passerait. Qu’il suffirait de quelques photos imprécises, de quelques vidéos mal légendées et de déclarations douteuses pour duper tout le monde.

Pour ma part, je suis journaliste. Et alpiniste à mes heures perdues. J’ai gravi l’Everest en 2008. En quelques minutes à peine, les incohérences m’ont sauté aux yeux. Rien ne collait. Et après avoir mené une enquête journalistique, le constat est clair : Nessim Hachaichi n’a pas atteint le sommet. Pas de certificat officiel. Pas de photo à 8 848 mètres. Et surtout, son propre guide a confirmé qu’il s’était arrêté avant. C’est irréfutable.

Je connais Nessim Hachaichi de loin. Depuis trois ans, il répète partout qu’il sera « le premier Algérien né en Algérie » à gravir l’Everest. Derrière cette formule, il y a une attaque personnelle à peine voilée. Car oui, j’ai été le premier Algérien à atteindre le sommet de l’Everest, le 25 mai 2008. Mais comme je suis né à l’étranger (en France), à ses yeux, je serais un « sous-Algérien ». Cette obsession de la pureté nationale n’a pas sa place dans le sport, encore moins dans une discipline aussi exigeante que l’alpinisme. Il ne suffit pas de naître quelque part pour mériter un sommet. Il faut le gravir.

Mais le pire, c’est que par son mensonge, il ne salit pas que sa propre réputation. Il décrédibilise l’alpinisme algérien tout entier. Il jette le doute sur les vraies réussites, celles des femmes et des hommes qui donnent tout, sans tricher, pour accomplir quelque chose de grand. Il alimente les stéréotypes sur les Algériens, au lieu de les combattre.

Et pendant ce temps, les médias ? Ils ont relayé son « exploit » sans même faire l’effort de vérifier. Aucun fact-checking. Aucun recoupement. Et surtout, aucun retour en arrière. Aucun mea culpa. Rien. Le silence. Et les dégâts sont là.

Autre chose : aucun média français ou occidental ne s’est intéressé à cette imposture. Pourquoi ? Parce qu’elle ne concerne pas un alpiniste occidental ? Parce qu’elle met en scène un Algérien, donc jugée moins « vendeuse » ? C’est une grave erreur. Les lecteurs raffolent de ce genre d’histoires, peu importe la nationalité du héros — à condition qu’on la leur raconte.

Soyons francs : si un Britannique, un Américain ou un Suisse avait monté un tel mensonge, on en aurait parlé partout. Mais là ? Silence. Une fois de plus, quand il s’agit d’Arabes, on regarde ailleurs.

Au fond, Nessim Hachaichi et les médias qui ont relayé sa supercherie se ressemblent : obsédés par le buzz, prêts à sacrifier la vérité sur l’autel de la visibilité. Prêts à tout pour faire parler d’eux, même à mentir.

Mais la montagne, elle, ne ment jamais. Elle ne pardonne pas non plus. Le sommet ne s’atteint pas avec des mots, des likes ou des coups de com’. Il s’atteint avec du courage, de l’humilité, du respect et de la vérité. Et ça, certains feraient bien de s’en souvenir.

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